Depuis le 14 octobre 2022, le Burkina Faso amorce une nouvelle page de son histoire avec la désignation d’une nouvelle équipe pour conduire la destinée du pays. Une nouvelle équipe qui a pour mission de reconstituer l’intégrité du territoire mais aussi ramener la paix et la cohésion au sein des populations. Pour mieux cerner les tenants et les aboutissants de cette nouvelle ère, nous avons rencontré, Dakiri Sawadogo. Acteur du développement, Dakiri Sawadogo est le président du conseil d’administration du ROJALNU Burkina et administrateur de TUID, une organisation internationale basée au Canada. Selon cet acteur de développement, pour une bonne conduite de cette nouvelle transition, les acteurs devraient corriger les failles et de donner au Burkina Faso sa stabilité et sa sécurité. Il estime que le Burkina Faso est une pente de son histoire et « si on ne construit pas rapidement une dynamique de cohésion sociale, il y a fort à parier la perte du pays ».
Comment se porte le ROJALNU aujourd’hui après sa période de turbulence ?
Aujourd’hui il faut dire que la structure tient bon. Les uns et les autres ont vu tout ce que nous avons connu comme machination. Malgré tout cela, nous avons tiré notre épingle du jeu parce que la vérité, c’est la seule qui tient débout longtemps. C’est vrai que nous avons traversé une zone de turbulence sans précédent, mais nous pensons aujourd’hui qu’avec les changements successifs qui sont intervenus, les autorités ou les politiques sont en train de comprendre qu’il faut jouer franc jeu avec les acteurs du développement mais aussi avec les citoyens au risque de se retrouver dans une situation sans répondant ou on n’a pas de soutien parce que simplement on a passé son temps a lutter pour arracher ou même déposséder des citoyens honnêtes de leur initiative pour mettre à disposition des gens sensés être leurs bons petits. Les acteurs de développement que nous sommes, nous travaillons pour l’intérêt du pays en droite ligne avec l’agenda mondial du développement. Lorsque c’est mal compris par les politiques, ils essaient de semer le trouble au sein de vos organisations, peut-être dans le but de le contrôler ou de l’affaiblir. Parce que ceux-ci pensent que ce sont des hommes mieux connus ou mieux côtés auprès des populations et peuvent être un danger concurrentiel pour eux et donc, il faut ternir leur image ou saboter leur travail. Souvent ce n’est pas intéressant et c’est ce qui fait que le pays est dans cette série d’instabilités que nous connaissons.
Comment avez-vous accueilli ce coup du 30 septembre 2022 ?
C’est avec un pincement au cœur que nous l’avons appris, parce que cela relève d’un échec à tous les niveaux. Un échec pour le commun des mortels. On va cibler Damiba ou X et Y. Sur tous les plateaux ou nous sommes passés, nous avons dit que nous soutenons l transition tout en prenant le soin de dire ce que cette transition doit faire pour que cela marche. Chaque fois que l’occasion s’est présentée de rencontrer des autorités, nous, en tant qu’acteur de développement nous avons donné notre vision, ce que les populations attendent de cette transition. Vous savez, la majorité ce sont ceux-là qui sont dans des machinations politiques quand ils sont face à l’autorité. C’est d’abord se faire aimer, se faire accepter et l’autorité aime quand on parle mal des autres. C’est tout cela qu’il faut mettre dans le panier de l’échec du MPSR dans son ensemble. Ce n’est pas seulement Damiba, c’est tout le MPSR qui a échoué. Ce qui est intervenu le 30 septembre 2022, on pourrait le qualifier d’un réaménagement. Nous en tant qu’acteur de développement et observateur de la scène politique, nous estimons que ce n’est pas toujours de bon ton que nous soyons dans une série perpétuelle d’instabilité ou de coups d’état. Les hommes qui arrivent à la tête de l’Etat doivent se mettre au-dessus de la mêlée, jauger la balance et travailler pour l’intérêt de la nation, pour l’intérêt de tous les Burkinabè et aller chercher partout où il se trouve les compétences. Parce que le plus souvent on aime la facilité, on aime passer par les mêmes procédures. Depuis des années nous sommes dans le même rétropédalage sur le plan sécuritaire, sur le plan social, sur le plan culturel et même sur le plan de la cohésion sociale on ne tire pas des leçons et continue de poser les mêmes actes qui nous conduisent toujours vers ce que nous connaissons et en mon sens m’a donné un pincement au cœur. Je ne suis ni content ni mécontent. J’estime seulement que toute révolution à ses rebondissements et même les grandes nations que nous avons connu dans l’histoire ont connu des séries de recommencement, mais à un moment, il faut prendre conscience que si on ne construit pas rapidement une dynamique de cohésion sociale, il y a fort à parier la perte du pays.
« Le peuple burkinabè quand il est silencieux et qu’il observe, c’est qu’il attend de voir et d’apprécier »
Fallait-il un autre coup au Burkina Faso dans un contexte d’insécurité ?
Dans cette situation d’insécurité, il revenait aux acteurs de s’entendre. Il leur revenait de donner l’exemple qu’on peut se comprendre sans passer par la division profonde comme nous avons connus et qui a conduit à ce coup d’Etat en moins de 10 mois de celui de janvier 2022. Ce coup qui vient du même bloc, pour moi, est un aveu d’échec. On n’avait pas besoin de ça mais c’est arrivé, il faut tirer toutes les conséquences qui vont avec pour avancer.
Est-ce que cet autre coup d’état n’enfonce pas encore plus le Burkina ?
Si ! Mais c’est aussi peut-être parce que le dialogue n’a pas été priorisé au sein du groupe de départ qu’ils en sont arrivés à cette division profonde. J’estime que si l’objectif de ceux qui sont là aujourd’hui, c’est de corriger les failles et de donner au Burkina Faso sa stabilité et sa sécurité, nous allons constater cela dans les mois à venir et nous allons apprécier objectivement si ce coup en valait la peine ou pas.
Un commentaire sur l’issue des assises ?
Vous savez nous avons pour tradition d’interpeler toutes les couches sociales dès qu’il y a des évènements de ce type sur la nécessité de prendre en compte les expériences passées et de corriger les erreurs. Bien avant la tenue des assises nous avons expliqué par voie de presse un certain nombre de points sur lesquels nous estimions que les nouvelles autorités doivent s’y pencher. Nous avions souhaité que la voix du peuple soit entendue, et à défaut de supprimer l’ALT. Il fallait des volontaires sans salaires, seulement des indemnités, mais pas des indemnités extravagantes. Nous estimons aussi qu’il faut plafonner ces indemnités. Pour la situation que le Burkina connait, pour quelqu’un qui vient pour apporter quelque chose, nous croyons qu’il faut certes le minimum pour travailler. Les enseignants qui sont dans les zones d’insécurité et qui y travaillent durement, nous ne pensons pas qu’ils aient 300 000 F CFA comme salaire à la fin du mois. C’est à ces personnes qu’on doit apporter plus.
« La politisation de l’administration et des organisations de développement a mis en mal notre cohésion sociale »
Votre avis sur les 21 mois de durer de la transition
Les 21 mois, c’est un délai d’action. J’estime que s’il (capitaine Ibrahim Traoré) se donne les moyens de travailler, au bout des 21 mois, il peut atteindre les objectifs qui lui sont assignés. Tout va dépendre de leur dynamisme et de leur engagement, et de leur volonté à sortir le Burkina de cette situation. Ceux qui sont arrivés en septembre font partis du même groupe de janvier 2022 donc pour nous, c’est toujours le MPSR. Cela veut dire qu’ils connaissent les failles et savent où agir. Pour cela, il faut agir avec efficacité, agir avec beaucoup de promptitude, mais surtout avec beaucoup de responsabilité pour éviter qu’au bout des 21 mois, on soit dans une situation encore précaire. Mais si au bout des 21 mois, il y a une amélioration significative et qu’il y a encore des poches régulations ou d’amélioration, à ce moment, des dispositions peuvent être prises pour, de façon spéciale, donner un délai de rigueur supplémentaire qui ne va pas dépasser juste quelque mois pour aboutir à une élection transparente et équilibrée. Une élection qui n’a pas de partie prise et qui va permettre au Burkinabè qui a la meilleure idée d’arriver au pouvoir.
Est-ce que vous avez été associé ?
Comme il est de tradition au Burkina, il n’y a aucune assise à laquelle nous avons été directement associé, mais nous sommes toujours consultés par d’autres acteurs avant. Nous sommes sollicités et nous apportons nos conseils et orientations. Et c’est dommage. Nous l’avons dit à nos doyens en 2008 lorsqu’on créait le Conseil national de la jeunesse que l’acte qu’ils sont entrain de poser était la porte ouverte pour une instabilité du Burkina dans moins de 10 ans. Et je pense que l’histoire ne nous a pas donné tort. Nous l’avions aussi dit sous le MPSR qui vient de partir sur plusieurs plateaux qu’il ne fallait pas aller à la recherche de quelques solutions que ce soient sans les acteurs du développement. Nous avons rencontré certaines personnalités de l’époque, nous leur avions signifié cela, mais malheureusement, la priorité est toujours vers les penchants politiques. Alors que pour ces penchants politiques, c’est toujours les prochaines élections qui sont préoccupantes pour eux. Nous pensons qu’il faut souvent prioriser dans une situation comme celle de la transition des techniciens clés. Même dans les ministères, s’il doit y avoir changement, il faut prendre des techniciens. Un exemple depuis que nous avons connu le ministère de la Jeunesse, le plus souvent, à 90% pour ce que nous savons, ce sont des politiciens qui dirigent ce département et vous voulez que la jeunesse soit unie. En quoi elle va être unie ? C’est ça la grande question. Il faut donc pour un département comme la jeunesse trouver un technicien du ministère qui a été formé. Qui connait les problèmes de la jeunesse, la problématique des jeunes pour conduire ce département afin de lui donner toutes ces lettres de noblesse, d’équilibrer et de travailler à ce qu’il n’y ait pas des jeunes du bord de X ou du bord de Y mais des jeunes burkinabè qui ont les mêmes chances. Que l’égalité des chances soit pareille pour tout jeune burkinabè. Aujourd’hui, il y a échec parce que les soutiens et les appuis vont dans les mêmes directions. Vous trouverez dans ce pays des jeunes qui ont de belles idées ou de belles initiatives mais qui sont étouffées dans l’œuf, ou bien on prend ces initiatives et on les passe à d’autres qui ont des relations. Au vu de cela nous pensons qu’il y a beaucoup à faire.
« La réconciliation voulue au Burkina Faso est entachée de beaucoup de calcul. Nous doutons forts que nous arrivions à une réconciliation parce que à chaque étape, nous créions d’autres frustrés »
Un mot sur le nouveau premier
Nous avons constaté la nomination d’un PM le vendredi 21 octobre 2022 qui sort de l’ordinaire. Ce nouveau premier ministre, je le connais pour ces interventions dans les médias. J’ai même eu l’occasion de partager des plateaux de débats avec lui. Il est percutant, mais attendons de le voir à l’œuvre. Nous espérons qu’il agira dans un sens équilibrer sans partie prise mais qu’il travaillera pour l’intérêt du peuple burkinabè. Nous l’attendons au pied du mur et la première chose qui va déterminer cela, c’est d’abord la formation du gouvernement, la qualité des personnes qui doivent être dans ce gouvernement. Nous estimons que de façon voilée, il n’est pas attaché à un quelconque parti ou clan. Sinon, ce qui est arrivé va revenir. Aujourd’hui, il faut peser le pour et le contre de tous les actes qu’on pose parce que le peuple burkinabè quand il est silencieux et qu’il observe, c’est qu’il attend de voir et d’apprécier. Nous souhaitons que le nouveau Premier ministre agisse pour l’intérêt du peuple avec les nouvelles autorités pour éviter d’avoir une balance déséquilibrer.
Quelle analyse faites-vous sur le nouveau gouvernement qui viendra après cette nomination ?
Pour mon portrait-robot du nouveau gouvernement, je dirais que les gens attendent des techniciens pratiquants qui ont fait leurs preuves et qui sont dans les départements ministériels pour cette période et qui n’ont vraiment pas de connotations politiques qui travaillent dans l’intérêt de l’administration publique et de leurs missions. Parce que je doute fort que dans une situation de transition que des politiques viennent et ne travaillent pas pour leurs bords. Chaque politique qui va être conduit dans une transition, travaillera de sorte que les élections prochaines soient favorables à son camp. Il faut que ceux qui vont être choisis, soient responsables pour comprendre que c’est sur leurs épaules que repose la cohésion sociale, c’est sur leurs épaules que reposent le retour de la sécurité et la paix. S’ils agissent donc mal, ils auront assumé l’entière responsabilité de toutes les conséquences qui vont s’ensuivre.
« Le peuple burkinabè quand il est silencieux et qu’il observe, c’est qu’il attend de voir et d’apprécier »
Le capitaine Traoré lors de ses première sorties médiatiques a étalé sa ferme volonté d’aller « vers d’autres partenaires » prêt à aider le Burkina Faso dans la lutte contre le terrorisme. Quel est votre avis sur le sujet ?
Nous pensons qu’on ne jette pas un partenaire pour aller vers un autre. Par contre, on diversifie ses partenariats dans la limite du possible, selon les centres d’intérêts et selon les époques. Nous sommes convaincus que la diversification des partenariats ne constitue pas un problème. J’ai pour tradition de dire que l’on peut ne pas être en bons termes avec quelqu’un, mais on peut travailler à améliorer notre partenariat et notre collaboration. Je prendrais pour exemple ce qui se passe aujourd’hui en Europe, vous verrez qu’il y a un conflit profond entre la Russie et l’Ukraine. Et dans ce conflit ; il y a des pays qui se mettent au-dessus de la mêlée, qui travaillent dans l’intérêt des leaders de leurs pays. Je prends l’exemple de la Turquie qui est en même temps membre de l’OTAN et qui arrive à parler à la Russie et arrive à avoir sa confiance. La France qui est un des soutiens immenses de l’Ukraine, a un gros intérêt en Russie. Le dialogue n’est pas rompu entre ces deux pays. Je pense donc que nous devrions travailler à déceler les failles, à les corriger, à multiplier les partenariats. Multiplier les partenariats sous-entend qu’on met les partenaires en compétition. Chacun sera obligé de s’améliorer et de faire en sorte que ce soit un partenariat gagnant-gagnant. C’est vers là où on gagne que l’on s’oriente. Nous souhaitons que le Burkina s’oriente vers tous les partenaires qui vont lui apporter une amélioration dans son processus de développement, une amélioration des conditions de vie de ces populations, une amélioration de la dynamique de cohésion parce que cela doit aussi commencer par là.
D’aucuns pensent que ce partenariat doit être d’abord local ?
Nous dirons oui et mieux encore. Un partenariat local certes, mais un partenariat depuis que l’humanité existe n’a jamais été local. Sous les empires il y avait des partenariats. Les ambassadeurs ne sont pas nés sous nos cieux. Dans les temps anciens, il en existait. Nous avons besoin aujourd’hui de prendre conscience que nous devons construire ce pays sur des siècles. Ce partenariat doit être endogène, mais ne doit pas exclure les autres.
Dans le vent du putsch des manifestants dans la rue ont demandé le départ de la France. Est-ce que cela est une nécessité véritablement ?
Nous ne croyons pas que cela soit une nécessité. Prenez le cas rwandais. Malgré ce que le Rwanda et la France ont connu, il existe toujours une Ambassade française dans ce pays et les relations diplomatiques entre ces eux pays existent belle et bien. L’histoire doit nous permettre de nous renforcer et de nous construire. L’histoire doit nous permettre d’améliorer ce que nous avions connu comme lacune. Cela ne doit pas être une porte pour nous, de nous enfermer. Demander le départ de la France du Burkina ne doit pas être une solution. La solution, c’est d’abord nous-même. Il faut qu’on pense durable. Il ne faut pas oublier cela. On ne peut pas évoluer en autarcie. Ce qu’il faut faire c’est tirer le meilleur profit de chaque partenaire que nous avons en face de nous pour nous construire.
Dans ce vent de renversement, la France a décidé de fermer ces enclaves. Est-ce cela ne démontre pas les prémices d’une crise ouverte entre ces deux pays ?
Entre les nations, il va toujours exister des mésententes, mais il y a toujours la voie diplomatique. Il reviendra donc aux nouvelles autorités de mettre en avant la voie diplomatique pour atténuer les effets de tout ce qui arrivé. Des raisons peuvent être avancées d’une manière ou d’une autre, mais il faut travailler sur la voie diplomatique pour un retour à la normale des relations entre le Burkina Faso et la France, mais aussi ne pas balayer d’un revers de la main toutes les relations qui peuvent permettre d’avancer sur un terrain ou un autre. Quand les crises naissent c’est aussi l’occasion de revoir notre façon de travailler ensemble et de se donner les moyens pour les éviter dans le futur.
Quelles sont les attentes des organisations de développement
Vis-à-vis du nouveau gouvernement, nous allons encore réitérer ce que nous avons dit par voie de presse. Il faut éviter d’aller sans les acteurs du développement. Nous déconseillons aux nouvelles autorités de naviguer sans les acteurs du développement. C’est vrai que les acteurs politiques sont importants dans la vie d’une nation mais à une période donnée. Les acteurs de développement, même en période de crise, sont avec les populations. Les FDS sur le terrain peuvent en témoigner car ils se côtoient au quotidien sur le terrain. Nous estimons qu’aujourd’hui que les nouvelles autorités ont carte blanche pour étudier chaque situation selon son contexte pour nous éviter un perpétuel recommencement, sinon même plus critique si cela doit se poursuivre.
Un commentaire sur la suspension des activités des partis politiques et des OCS
Il y a un peu d’amalgame parce que quand on dit OSC, les gens font un fourre-tout. Ce qui est sous-entendu comme OSC sous nos cieux c’est ce qui est motivé par les partis politiques le plus souvent. Alors que vous avez des ONG, des organisations de développement qui elles sont créés pour résoudre des questions spécifiques des populations. Ces acteurs du développement quel qu’en soit la situation sont sur le terrain. Vous savez, il y a des ONG de développement qui sont nées même en période de guerre. Pour nous, cette suspension concerne plus les OSC politiques et assimilées. Nous pensons qu’il y a même eu une précision sur le sujet. On ne peut pas interdire aux acteurs du développement de continuer à travailler sur le terrain.
Est-ce que vous pensez que la réconciliation peut être un facteur de retour de la paix au Burkina Faso
C’est parce qu’il n’y a pas de réconciliation jusque-là que nous sommes dans cette situation. Si la réconciliation avait été savamment murie, c’est-à-dire que si cela avait été portée par tous de façon sincère sans calcul, on en serait pas là. La réconciliation voulue au Burkina Faso est entachée de beaucoup de calcul. Nous doutons forts que nous arrivions à une réconciliation parce que à chaque étape, nous créions d’autres frustrés et d’incompréhensions entre nous. Aujourd’hui, c’est très difficile d’avancer si nous n’arrivons pas à construire une cohésion sociale au Burkina Faso. Tout va partir de là. La politisation de l’administration et des organisations de développement a mis en mal notre cohésion sociale.
Comment entrevoyez-vous la suite de cette situation ?
Nous l’entrevoyons à deux niveaux. Le premier niveau et d’ailleurs c’est notre souhait à tous, est que le Président Ibrahim et toute son équipe tirent les leçons des échecs de tous les régimes qui se sont succédés depuis 10 ans. Qu’il s’approprie un dialogue franc et constructif avec toutes les composantes de ce pays pour trouver une solution pérenne et durable. Il faut éviter les règlements de compte tant qu’on peut. Il faut que la vérité prime à un certain moment ou à un autre. Nous souhaitons que ces nouvelles autorités travaillent dans l’intérêt du peuple. Qu’ils travaillent dans une vision d’un Burkina dans 100 ans ou 200 ans. Comme le disait l’ancien président ghanéen, Jerry Rawlings : « quand nous allons finir de mettre les outils en place, même le diable ne pourra pas intervenir pour agir ». Il faudrait donc que ce soit la même chose. Que cette transition soit l’occasion de faire du Burkina Faso, le pays de tous les Burkinabè. Ce qui a tué le Burkina Faso, c’est la politisation à outrance des couches sociales. Voici un pays où on utilise l’argent du contribuable pour diviser le contribuable. Tant que les populations vont se réveiller et ne pas savoir ce qu’il faut manger, nous serons toujours dans l’insécurité. Il faut travailler sur tous les fronts mais il faut aussi prioriser les priorités.
Avez-vous quelques choses à ajouter pour clore cet entretien ?
Comme les médias, nous pensons que l’Etat doit aller vers les acteurs du développement. 21 mois c’est beaucoup mais c’est à la fois peut de travailler à mettre en place les outils qu’il faut pour éviter à notre pays après les élections prochaines de retomber dans d’autres crises.