Dans cette note qui suit, Labidi NABA Président du think-thank Observateurs Sans Frontières (OSF) interpelle les éléments de la commission technique d’élaboration de projets de textes et de l’agenda de la transition sur « l’impérieuse responsabilité de réussir » la mission qui leur est assignée. Pour lui, cette commission doit « indiquer dans vos conclusions l’indispensable nécessité du MPSR de susciter auprès de ces masses fondamentales la fibre patriotique en donnant lui-même l’exemple ».
Vous êtes oint d’une mission historique, honorable ; celle d’élaborer la charte de la transition, de définir les organes de la transition, son calendrier et tout cela dans un consensus total.
Engagés sur la base de vos compétences, du bénévolat valeur en voie de disparition au Burkina, en exemple, vous venez de faire mieux que ceux, ministres se sont taillés des doubles salaires contre la loi. Durant 5 longues et pénibles années nous nous sommes battus contre cette forfaiture en vain.
Dans votre noble mission, certains soutiendront que vous étiez dans les conciliabules du putsch avec les militaires, et même que vous en êtes les têtes pensantes au gré de vos convictions de légalistes et de républicains.
Deux semaines de travail intellectuel, d’intensité, d’insomnies, de week-end sacrifié pour ceux qui en avaient, de débats contradictoires, vous pourrez être amenés à vous interroger pourquoi vous vous êtes lancés dans ce chantier ?
Mais sachez que vous faites le bon combat ! Celui d’écrire un nouveau Burkina Faso sur la base des acquis, des échecs et de nos aspirations nouvelles.
Aussi, un indicateur de votre probité est clair et palpable, personne de vous ne traîne de casseroles et vos compétences dans vos domaines respectifs ne sont plus à démontrer.
Mais vous vous exposez au prétoire de l’histoire de notre peuple. Si vous réussissez, on vous applaudira si vous échouez vous serez seul coupable.
Vous avez donc l’impérieuse responsabilité de réussir. Vous devez réussir dans l’intérêt de tous ceux qui ont appelé à la transformation structurelle profonde de notre Etat et de notre société depuis belle lurette. Tous ceux qui ont eu l’espoir après l’insurrection populaire d’octobre 2014 et qui ont assisté impuissant à la trahison de cet espoir.Ces Burkinabè sont encore là et pensent que nous tenons là une opportunité historique de réussir ce que nous n’avons pas pu en 2015. Ils sont prêts au sacrifice suprême pour l’édification d’un Etat-nation prospère, égalitaire et méritocratique pour la postérité ; seulement, ils ont besoin de gage.
Vous devez indiquer dans vos conclusions l’indispensable nécessité du MPSR de susciter auprès de ces masses fondamentales la fibre patriotique en donnant lui-même l’exemple. Cela doit être clairement mentionné dans vos textes et constaté sur le terrain. Ne faites pas comme l’ancienne classe qui occulte, qui se taille des textes au discernement doublement obscures juste pour se donner la force de l’interprétation et qui a souvent conduit notre peuple à la révolte ou à la moindre rigueur à l’indignation : article 37 en 2014, rotation des composantes à la CENI en 2021.
Les aspirations profondes du peuple burkinabè sont connues et sont loin d’être uniquement la lutte contre le terrorisme. L’insuccès face à la lutte antiterroriste est bien aussi la conséquence de notre échec dans l’implémentation de nos politiques de décentralisation et de déconcentration et celui de la lutte pour une véritable souveraineté. La faillite de l’exécutif local en termes d’offre des services sociaux de base à leur population est aussi catalyseuse de l’enrôlement de certains de nos concitoyens auprès des groupes terroristes. Notre échec à donner à chaque Burkinabè 3 repas par jour ou du moins 2 repas par jour en est aussi un motif.
Vous avez donc l’obligation de ne pas trahir cette volonté du peuple.
Vous tenez la responsabilité historique de transcrire intelligemment ces aspirations dans vos résultats pour éviter à notre nation un sempiternel recommencement ; votre conviction patriotique, votre empathie vis-à-vis du cultivateur, de l’ouvrier, de l’étudiant, du malade, du travailleur, du chômeur, du prisonnier, de la veuve, de l’orphelin du jeune et de la personne âgée devront en être les moteurs qui vous guident et vous orientent.
Autres guides, ce sont ces interrogations de ce que pourquoi 7 ans après une insurrection populaire qui a vu couler le sang de nos concitoyens, après une charte de la transition et une transition d’un an nous n’avons pas pu répondre aux aspirations du peuple malgré des élections transparentes ? Pourquoi sommes-nous revenus à la case départ ? Qu’est-ce qui n’a pas marché ? Répondre correctement à ces interrogations signifie s’interroger sur les causes et non de s’occuper de panser les conséquences.
Vous devez aller du postulat de ce que le Burkina est un pays riche dont les richesses sont concentrées dans les mains d’un groupuscule qui coopère avec une oligarchie internationale exploiteuse, qui ne s’occupe que de leurs intérêts familiaux et claniques accrochés au haut niveau d’une administration publique taillée à leur profit. Laissant au banc de touche leur obligation de donner aux Burkinabè laborieux l’autosuffisance alimentaire, la santé, la sécurité et le bien être tant recherchés.
Si vous dévoyez de ces interrogations et de ces orientations, vous passerez à côté de la refondation hautement convoitée. Que l’on ne se fourvoie pas sur les objectifs de la transition ! L’un de ces objectifs sine-qua-non est la transformation structurelle profonde pour poser les bases fondamentales de notre État-nation. Seules ces bases bien construites qui nous éviteraient à la postérité des insurrections et des coups d’État. C’est le fondement premier de l’État de droit démocratique.
C’est là où se trouve mon seul intérêt : votre succès dans cette refondation.
Si vous échouez vous serez crucifiés à l’autel de l’inquisitoire du peuple.
Si vous fléchissez face à ceux qui ont une aversion contre le renouveau démocratique, contre la dynamique de rupture à imprimer, ceux qui craignent de perde les privilèges et les richesses illicites amoncelées dans des comptes bancaires au Burkina et a l’étranger, vous devrez alors faire face au courroux violent du peuple.
Je ne vous souhaite pas ce sort !
Je vous encourage à avancer dans le sens de l’intérêt supérieur de la nation.
Enfin, votre responsabilité ne devra pas s’arrêter à la remise des résultats de vos travaux, vous devrez travailler à veiller à l’application de ces recommandations ; puisque vous aussi vous serez jugés sur le succès de la feuille de route de la transition.
Labidi NABA
Président de Observateurs Sans Frontières (OSF)